Journal de Pathfinder- Chroniques de Kallumn I

110ème jours du 96ème cycle de Kallumn 

-16h22

Je me nomme Laurent Pathfinder et je suis journaliste indépendant depuis 17 ans. Ce nom vous est inconnu dans le milieu ? Sans surprise. Non pas que je sois un rédacteur médiocre mais faut se l’avouer, le monde du journalisme est un monde rude. Encore plus ici sur Kallumn, colonie de la Terre dans le Cyclone ardent, en cette ère où la technologie nous envahit de partout. Drones et caméras de surveillance enregistrent le moindre évènement majeur se produisant et les forces de l’ordre se doivent de donner leur aval sur quelles informations à divulguer et surtout qui couvrira l’évènement. Vous vous doutez bien que le premier choix, ne se porte pas sur nous les freelances. Les gros morceaux sont toujours arrachés par les grandes têtes d’affiche et oh combien de fois me suis-je retrouvé à écrire sur telles ou tels sujets imbéciles : un chien qui aurait marché sur l’eau ou un vieil homme, ayant retrouvé miraculeusement la mémoire d’une de ses vies précédentes, en tant qu’empereur Romain. Allez savoir d’où vient cette Rome dont personne n’a entendu parler. Des balivernes inventées de toute pièce afin de pimenter leur minable quotidien fade et constamment sous surveillance. Mes talents d’écrivain hors-pair réduits à ça. Cela ne peut durer.

Les Kallumnis sont peut-être des gens tristement ennuyeux, s’il y a bien une chose digne d’intérêt ici, c’est bien le climat de la planète et surtout le fait qu’il n’y fasse jamais jour. Une nuit perpétuelle et éternelle. La surface habitée par les humains, qui constitue un tiers de celle de la planète étant recouverte d’un dôme, nul ne sait exactement ce qui se trouve derrière les barrières.

Oui ! Ça c’est un sujet qui ferait du bruit, je me vois bien obtenir un prix Astralpho avec ça. Le dôme se charge d’assurer un éclairage artificiel et ainsi de subdiviser le temps en 24h à l’instar du cycle de La Terre. Mais le dôme sert d’autres objectifs. Il protège les habitants de Kallumn des Kallumnjins, les occupants originels de la planète.

Les Kallumnjins sont des monstres humanoïdes de trois mètres de haut qui se nourrissent de la faune de la planète en dehors du dôme ; faune qui se fait rare dans le monde glacial de la nuit éternelle de Kallumn, et éventuellement d’humains si l’occasion leur était donnée.

Ces mots sont couchés dans tous les livres d’histoire et inculqués à tous. Le message était clair, ne sortez pas du dôme. C’est tout ce qu’il y a comme description d’eux, on aurait dit un monstre tout droit sorti des cauchemars d’un gosse de 7 ans. Mais cela suffisait à tenir les humains dans le dôme, mais pas moi. Aujourd’hui je découvrirai ce qui se cache derrière cette carapace.

 -23h07

Je me trouve actuellement dans un des tunnels d’évacuation d’eaux usées, équipé d’une combinaison étanche afin de ne pas abîmer mon carnet et mon appareil photo le moment venu. Je pense que j’entends, ça y est ça…

-23h29

Ce fut…horrible. Imaginez-vous emporté par une rivière d’excréments et de toutes sortes de fluides humains pour ensuite atterrir dans une mer d’encore plus de détritus. C’était…littéralement ça en fait. Qu’importe. J’ai réussi ! Je suis dehors ! La nuit existe à l’intérieur du dôme mais ce n’est qu’une nuit fictive avec des lumières de caméra dans tous les recoins. Rien comparé à ça, cette nuit authentique. Comment vous décrire ça ? Vous voyez cette sensation de crainte et d’attente lorsqu’on vous demande de fermer les yeux. Ce moment où tout pourrait arriver, l’inconnu. Mais en même temps imaginez que c’est vous la personne qui observe l’individu aveuglé. Il est là devant vous, à la merci du moindre de vos actes. Et bien imaginez ressentir ces deux sensations en même temps. Être chasseur et proie à la fois. C’est ça la nuit, la vraie. Autant de beauté dans un phénomène qui n’est qu’obscurité.

112ème jours du 96ème cycle de Kallumn

-01h02

J’ai pris des photos du ciel ; qui pour imaginer qu’il pouvait y avoir autant d’étoiles dans le ciel? Tellement d’étoiles, mais aucun Kallumnjin. Pas la moindre trace de ces horribles bêtes censées ne faire qu’une bouchée de moi dans ce monde de ténèbres. Juste le bruit de la faune nocturne et le regard d’un oiseau inquisiteur face à l’étranger venu perturbé son sommeil. Des oiseaux, vous vous rendez compte? Et même des insectes et pleins d’autres créatures qui me sont inconnues. Pourtant on nous faisait croire que la faune est quasi inexistante. Et toute cette végétation qui arrive à pousser sans la moindre lumière. Si étrange, tant de mystères.

-01h30

Assis longtemps au sommet d’une colline, j’ai réfléchi. S’il n’y a jamais eu de monstres, pourquoi le dôme ? Il y a assez de merveilles sur Kallumn qui méritent d’être découvertes, assez de place pour tout le monde. Plus besoin de cette régulation de population et de cette surveillance constante.  Ou alors…Ou alors le dôme n’a jamais été la solution mais plutôt l’objectif. Dans un monde de ténèbres une surveillance totale de la population serait impossible pour les dirigeants. Les gens seraient libres. Bon il y aurait sûrement plus de criminalité. Mais bon n’est-ce pas ça être humain ? Pouvoir choisir entre le bien et le mal, faire ses propres jugements sans être enfermé dans une cage. Et surtout pouvoir s’asseoir, comme moi en ce moment, pour contempler les étoiles et respirer ensemble le parfum de la liberté.

Je n’avais jamais autant cogité de ma vie, autant d’idées surgissent dans mon esprit sur des sujets tous aussi futiles les uns que les autres. Est-ce normal que dans cette obscurité oppressante je me sente aussi éclairé ? Cela me fait penser à ce vieux proverbe qui prend finalement tout son sens : la nuit porte conseil.

-03h19

J’entends des bruits…des engins à moteur. On dirait des camions, ceux utilisés par La garde. Mais oui quel idiot. Depuis le temps il doit bien y avoir eu des écervelés, comme moi, qui ont d’une manière ou d’une autre atteint l’extérieur du dôme. Comment aucun n’est jamais revenu ? On n’a jamais entendu parler d’eux. Et maintenant me voilà, comme ces idiots avant moi, attendant mon heure, apeuré. J’enterre ici mon journal dans l’espoir qu’un jour vous le lisiez et puissiez contempler cette vision du ciel, des étoiles ; mais dépêchez-vous car je compte bien l’emporter avec moi dans mes rêves, car oui il fait nuit et je m’en vais dormir.

Journal d’un précurseur de La Grande Évasion, Musée de La Nuit éternelle.

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2 commentaires :

  1. Murielle Kannayi

    L’univers décrit est pour le moins intriguant. Il pousse la curiosité mais je n’aimerais pas y vivre.
    Ton texte suscite pas mal de questionnement sur l’existence humaine, les règles, la société,… J’aime bien. Pour un tel univers, j’aurais vu plus de développement. Il est plutôt dense je trouve.

    • Il y aura d’autres entrées mais qui suivront des personnages différents. On découvrira un peu plus son fonctionnement interne avec chaque entrée et les événements ayant conduit à La Grande évasion. 😉

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